13.5.2024 J'ai besoin d'une pochette pour une phablette. Par la même occasion je voudrais utiliser mes essais de tissage et apprendre à enduire. Quelques infos sur les tutos en ligne et sur la cire saponifiée.
J'ai besoin d'une pochette pour le smartphone qui me sert de téléphone (une phablette), que j'emporte partout. Parfois dans un grand sac, parfois pas. Dans ce dernier cas, j'aimerais le porter en bandoulière. Par la même occasion je voudrais utiliser mes essais de tissage et apprendre à enduire.
Les tissés main, même denses, se détendent avec le temps. Pour le premier sac, je n'ai rien fait puisqu'il s'agissait de tissage double, dense et solide. Pour le prochain sac, je l'entoilerai de vliesline sur toute la surface, comme on le faisait en haute-couture il y a quarante ans encore. Pour celui-ci, je vais enduire le tissu de cire pour le rendre plus lavable, ce qui va le renforcer question durée dans le temps.
J'enduirai le tissu aussi, car l'objet sac est sujet aux souillures. Enduit, un coup d'éponge savonnée et roule ma poule. En outre, l'enduit rend le tissage plus solide et m'évite de devoir entoiler avec du 250.
On peut enduire un objet déjà cousu, je préfère enduire avant de coudre, cette fois-ci.
J'ai choisi un des tissus assez long que j'ai récemment tissés, parmi ceux que je n'aime pas trop, pour ce test de tissu enduit: le 367, en deflected double weave et cotonlin de chez Venne. Si ça rate, je ne le regretterai pas.
J'ai conçu un modèle avec très peu de coutures, car l'étape suivante sera un sac en cuir véritable, cousu à la machine aussi. Je n'ai jamais fait cela, je limite les risques d'erreur en réduisant le nombre de coutures.
Le 367: il s'agit d'un tissu de 88cm/34cm de large. Cela paraît long pour une tablette, mais je réalise des poches par pliage, ce qui m'évite des coutures et des solidifications de bordures.
Je prévois des sangles assez longues (ne fût-ce que pour pouvoir entrer et sortir la tablette), et un rabat devant. Les anses seront cousues sur le tissu, pour les solidifier, comme j'ai fait sur le sac nr I - mais ici, les anses sont visibles; et servent de séparations pour les poches.
Dans ce cas-ci, j'emploie tout le tissu généré lors de l'essai nr 367: les bords verticaux sont solides puisque ce sont les lisières du tissage, les deux bords horizontaux ont déjà été zigzagués. Je termine ces derniers par un bout de tissu bleu foncé, après avoir simulé la forme du sac et rectifié les bords supérieurs. En effet, à cet endroit, les lisières du tissu ne sont pas droites car j'ai intégré de la toile sans y porter attention: le bas du rabat est plus large que la pochette, à corriger! Je rectifie les bords en les crantant sur 5 cm, je zigzague soigneusement. Le reste sera contrôlé par l'enduit, qui empêche l'effilochage.
Je me suis fait un petit modèle en papier avant. Bien m'en pris, je me suis rendu compte qu'il fallait de longues anses/bretelles pour pouvoir sortir la tablette aisément.
Note pour les remarques à venir sur les anses: elles contreviennent aux habitudes, c'est délibéré, je voulais essayer la portabilité à l'épaule d'un autre positionnement. OK, c'est fait. Résultat: designer textile est un métier, je ne le ferai plus, c'est un peu inconfortable à transporter. Je reviendrai au positionnement classique.
En résumé je retiens: découper ou border haut et bas du tissu principal; anses; couture de soutien; enduire; repos; coudre anses, replier, coudre sur endroit.
1/ je couds ensemble de quoi faire des anses longues, dans du lin bleu dense: 125 cm sur 7cm de large fois 2 (je n'ai que des longueurs de 80cm, je dois bricoler), pour faire des sangles de 3 cm de large. Je les retourne au retourne-biais. Si le tissu n'était pas enduit, je les retournerais et j'y insérerais 80cm de bolduc de 2.5cm de large. Dans ce cas-ci, j'ai triplé les doses de cires pour durcir les sangles comme si elles étaient de cuir. Pas besoin de bolduc. On disait. Je verrai à l'utilisation.
2/ je couds un bout de tissu bleu foncé sur chaque extrémité horizontale du tissu principal, pour le finir; un repli classique donnerait trop d'épaisseur avec ce tissu de cotonlin. Souvent on termine un tissage par une trame en fil de couture, en prévision de l'ourlet final. Ici, le tissu 367 était un test, sans cette finition.
3/ j'enduis de cire A/ le tissu bordé haut et bas; B/ les anses. Je devrais attendre 2 à 3 jours de maturation, avant de coudre, mais il s'agit ici d'un test.
4/ je plie le tissu pour obtenir des poches et un rabat: 7cm de rabat, 20cm de corps et de poche rabattue en double, comme on le voit sur les photos précédentes. Je ne couds pas encore les bords verticaux, cette simulation me sert pour poser les repères. Je dois d'abord coudre les sangles sur une partie du tissu (endroit).
Voir photo, les épingles me servent de repère pour arrêter les coutures:
5/ je replie le tissu au format définitif et je couds les bords verticaux de la pochette, sur l'envers. Je pourrais coudre sur l'endroit, mais les lisières sont si irrégulières que je dois travailler en classique: coudre sur l'envers.
Je retourne la pochette. Finito! Une seule couture pour le corps du sac, deux pour les sangles
6/ Enfin, quasi fini. Je prévois deux bouts de tissu de 5cm/3cm, crantés et zigzagués, pour cacher les coutures des sangles (seront sur l'épaule). Je les couds à la main, après que les sangles ont été piquées aux extrémités pour former une grande boucle.
Je découpe normalement le tissu à la paire de ciseaux crantés, puis je solidifie la découpe par un point zigzag doublé de point droit (l'overlock sur ma machine). Ici, j'ai enduit ensuite. S'il fallait couper l'enduit, j'utiliserais une paire de ciseaux pour papier.
J'ai choisi de tester d'enduire sur un tissu foncé, puisque c'est ma première fois. Ne prenons pas de risques...
Se procurer de la cire d'abeille pure. J'ai acheté la cire brute chez un ami apiculteur en Ardennes. Ces pains pourraient être longuement blanchis au soleil (blanchiment mécanique versus le blanchiment chimique). Sous cette forme brute, ils changent la couleur du fil. Je procède donc à la cire blanchie (chimiquement), achetée à la droguerie Le Lion à Bruxelles.
1/ J'ai mélangé dans une casserole d'atelier moitié cire d'abeille blanchie (en perles), moitié paraffine (idem) et un filet d'huile de lin blanchie.
Ppourquoi de la paraffine, issue du pétrole, chez une écolo de coeur? Je n'avais pas assez de cire blanchie en stock, je ne ferai plus promis. L'huile de lin sert à assouplir le mélange.
J'ai fait fondre à feu doux, sur feu électrique, en surveillant constamment. J'ai versé dans des moules à madeleines, car j'ai choisi l'option "frotter un bloc puis chauffer". La prochaine fois, je procéderai au pinceau trempé dans la cire chaude.
2/ En dix minutes, les blocs de cire sont prêts, durcis, blanchis.
3/ Je procède par zones sur le tissu, déposé sur une feuille de papier sulfurisé: j'en frotte un sur l'endroit du tissu, sur une vingtaine de centimètres, sur toute la largeur. Je peux contrôler ce que j'ai déjà fait car je vois les zones du tissu blanchir. Je fixe la cire avec un sèche-cheveux, elle pénètre bien dans le tissu. Je continue zones par zones. En réalité, seul l'endroit sera vrament ciré avec cette technique, et c'est tant mieux: c'est lui qui a besoin d'être protégé.
NB J'ai essayé sur un chauffe-plat (résidu de la peinture encaustique), en baignant le tissu dans un fond de cire et en le lissant d'un couteau large. Cela a donné un effet cartonné. Pas souhaité, sauf pour les sangles. J'ai tâché de râcler l'excès au couteau, en chauffant. Bof. Plateau: ce matériel date de mes années en peinture à l'encaustique, on l'utilise pour des monotypes.
On peut enduire en cire pure, en mélange de cire et paraffine (ou colophane); on peut étaler de la cire fondue au pinceau ou au tampon; on peut frotter un bloc; on peut fixer par fer à repasser, par séche-cheveux, au four ou ... au séchoir ménager. Quantité de variantes.
Vous préférez des tutos imagés? Voir https://magazine.snaply.fr/tuto-enduire-tissu-avec-cire/ -
Ou en images qui bougent? voir https://www.youtube.com/watch?v=0cvX3O-vpFo
Cherchez aussi sur "bee wrap", voir comment faire sans faire fondre la cire:
NB "pine resin" - dans la vidéo, la dame intègre 2 vol de cire pour 1 vol de "pine resin": c'est de la colophane, résidu obtenu après distillation de la térébenthine. L'animatrice le fait dans le cadre des charlottes alimentaires, car cet ingrédient aiderait à adhérer au support et empêcherait les craquèlements (on manipule beaucoup ces bees wraps). Ce n'est pas nécessaire pour des sacs. En outre, je connais la colophane comme allergisante... Prudence. J'essaierai un jour, puisque j'en ai à l'atelier, mais à hauteur de 20% de la cire, comme dans les mélanges pour bois.
Détails techniques. Mes notes sur les sources de cire, datant de mes années de peinture à l'encaustique. La cire blanchie mécaniquement (BM): au filtre charbon et argile, produit de la cire qu'on appelle "de grade pharmaceutique ou cosmétique". Elle ne jaunit pas après trois ans comme la cire blanchie chimiquement (BC). Cette dernière serait décolorée au départ par acide phosphorique et permanganate de potassium ; parfois terminé par peroxide d’hydrogène. En peinture à l'encaustique, le film généré par la cire BM est plus solide que celui de la cire BC, aussi.
Pour le plaisir, souvenir d'un de mes monotypes à l'encaustique, sur papier japonais finissime:
Pour la prochaine opération de tissu enduit, je tenterai la préparation de cire saponifiée. Sous forme de lait/crème, elle sera plus facile à étaler. Attention, la fabrication dégage des vapeurs toxiques d'ammonium. Masque pro obligatoire; ou travail à l'extérieur. En peinture artistique, on évite cette forme, car elle est instable à cause d'un pH modifié, j'imagine.
Dans une très grande casserole: faire fondre 60g de cire dans 150g d'eau. Simultanément, diluer 15g de carbonate d'ammonium dans un peu d'eau. Quand la cire est fondue,y verser petit à petit le carbonate: ça va effervescer à dix fois le volume, d'où la grande casserole. Fouetter continûment jusqu'au refroidissement (éventuellement le cul de casserole sur de la glace, pour aider). On peut conserver longtemps cette crème de cire.
On pourrait saponifier avec d'autres bases, mais le calcul devient chinois, comme c'est le cas pour les savons. On risquerait alors de rater la saponification et de perdre la cire achetée avec tant de soin. Avec l'ammonium, on a un peu de jeu, si j'ai bonne mémoire (il y a 20 ans, j'ai pas mal étudié la confection de mediums de peinture maison. Je poste d'ailleurs en NB une remarque d'un des experts que je suivais alors).
Je reprends des extraits d'un commentaire de Jean-Pierre de www.Caseo.com, sur un forum je crois (il me semblait à l'époque le plus fiable des intervenants en peintures naturelles):
"Les cires saponifiées que l'on trouve dans le commerce "grand public" sont surtout constituées de cires de polyethylène et celles vendues par les distributeurs de produits écologiques sont souvent des mélanges de cires plus ou moins savonnées (ce qui permet un sous dosage de l'acali non volatil). La tenue à l'humidité et la compatibilité avec les pigments n'est pas la même !!! (…)
Le carbonate d'ammonium vendu comme additif alimentaire (E503) est un mélange à 50% de carbamate d'ammonium et de bicarbonate d'ammonium - N° CAS 506-87-6 et classé comme Nocif en cas d'ingestion Xn R22 (sympa pour un additif alimentaire non ?). Il convient pour la saponification mais en augmentant un peu la dose.
En fait, le plus souvent c'est du bicarbonate d'ammonium qui est utilisé et qui sert de poudre levante (levure chimique...). Le carbonate d'ammonium "technique" est plus pur (pas ou peu de bicarbonate) - N° CAS 10361-29-2 et tout aussi classé comme Nocif en cas d'ingestion (Xn R22). Chauffé au-dessus de 58° C, il libère un gaz ammoniacal qu'il est impératif de ne pas respirer. Là est le problème, car pour la cire saponifiée on va travailler au dessus de cette température.
C'est "moins pire" que l'ammoniaque en bouteille, mais pas sympa avec les poumons tout de même. Le demi-masque avec cartouche P, les lunettes de protection et les gants sont obligatoires (ce serait le cas pour les deux derniers avec le carbonate de potassium).
La contrepartie : la cire saponifiée est réellement superbe. Une fois les vapeurs ammoniacales évaporées, le produit est absolument sain et non toxique et certainement moins irritant qu'une cire au carbonate de potassium mal dosé. "